ENTRETIEN
Les sciences cognitives au programme des Cours aux Ernest
Il y a un an, Emma Badard a pris l'initiative de proposer un ensemble de cours introductifs donnés par des normaliens dans leur matière de formation, destinés à toute personne désireuse de découvrir une ou plusieurs matières. Son projet, soutenu par la Direction des études de l'Ecole, a vu le jour en septembre 2019. La plupart des disciplines enseignées à l'ENS y sont représentées. A la rentrée 2020, une série de cours d'introduction aux sciences cognitives est venue s'ajouter au programme sous l'impulsion de François Stockart et Eliott Owczarek, étudiants au Master de sciences cognitives de PSL, tout comme Emma.
Rencontre avec trois normaliens pleins d'énergie, passionnés par leurs études, animés par le désir de transmettre leurs connaissances.
EN SAVOIR PLUS
- Site internet des Cours aux Ernest (programme et inscription)
- Chaîne Youtube des Cours aux Ernest
RECHERCHE
Dois-je persévérer ou explorer ? Éclairage sur un mécanisme de résolution fondamental du cerveau
Dans un article publié dans la revue Science, Étienne Koechlin, directeur du Laboratoire de Neurosciences Cognitives et Computationnelles, Philippe Domenech, psychiatre à l’AP-HP et chercheur à l’Institut du Cerveau et Sylvain Rheims, professeur de neurologie aux Hospices civils de Lyon, révèlent un mécanisme fondamental de résolution partagé par tous les mammifères : la résolution du dilemme exploitation-exploration.
Lire l'article publié sur le site internet de l'ENS.
Comment notre cerveau différencie-t-il les phonèmes de la langue ?
Léo Varnet est chargé de recherche CNRS au sein du laboratoire des systèmes perceptifs. Il a récemment obtenu une bourse de recherche ANR pour poursuivre des travaux sur une méthodologie de psychologie expérimentale, initiés lors de sa thèse.
Une ANR-fast ACI pour, en somme, accélérer le calcul des Images de Classifications Auditives (ACI) et ouvrir la voie, demain, à un paramétrage véritablement individualisé des audioprothèses.
Lire l'article publié sur le site internet de l'ENS.
DANS LES MEDIAS
Coronavirus, une conversation mondiale : à quel point le Covid nous désoriente-t-il ?
Roberto Casati, directeur de l'Institut Jean Nicod et l'historien François Hartog réfléchissent ensemble aux désorientations, tant temporelles que spatiales, que nous vivons intimement et collectivement depuis le début de la pandémie, dans l'émission "Le temps du Débat" sur France Culture.
Peut-on vivre sans câlins ?
Charlotte Jacquemot, chercheuse au sein de l’équipe de NeuroPsychologie Interventionnelle, explique l’importance du toucher et l’effet de la distanciation sociale sur notre bien-être dans le magazine Marie-Claire.
Depuis le début de la pandémie, Charlotte Jacquemot contribue au site d’informations AdiosCorona.org qui vulgarise les différentes études scientifiques et qui apporte des réponses aux questions courantes que l’on se pose, notamment sur les gestes barrières.
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Les musiques les plus prévisibles sont-elles les meilleures ?
Jackson Graves et Guilhem Marion, membres de l'équipe Audition du Laboratoire des Systèmes Perceptifs, font un état de la recherche en sciences cognitives sur les attentes mélodiques dans l'émission Métaclassique diffusée sur www.metaclassique.com.
Ecouter l'émission
EN SAVOIR PLUS
- L'art au coeur de la science. Rencontre avec Sophie Cohen-Bodenes et Guilhem Marion
- "Comment notre cerveau réagit-il à la musique ?" (Vidéos)
A VOIR
Qu'est-ce que l'effort d'écoute ?
Ingrid Johnsrude est une neuroscientifique canadienne, professeure de psychologie à l'Université Western Ontario et titulaire de la Chaire de recherche du Canada en neurosciences cognitives. Ses thèmes de recherche sont le diagnostique et le traitement des problèmes d'audition, la déficience auditive, et la maladie cérébrale chez les personnes âgées.
Lorsque la parole est entendue en présence d'un bruit de fond, ou lorsque l'audition est altérée, les informations sensorielles à l'oreille sont souvent trop ambiguës pour permettre la reconnaissance de la parole par elle-même. Dans de telles circonstances, des processus guidés par la connaissance qui aident à interpréter et à réparer le signal dégradé sont nécessaires. La mobilisation des processus cognitifs explique probablement pourquoi l'écoute dans le bruit "semble" pénible, même lorsque l'intelligibilité est élevée. Un tel effort peut être aversif. Rendre l'écoute moins pénible devient alors primordial. Dans son exposé, Ingrid Johnsrude explique pourquoi il est important de s'intéresser à l'effort d'écoute, pourquoi, selon elle, les progès dans l'étude de l'effort d'écoute n'ont pas été aussi rapides qu'on l'aurait souhaité. Puis elle fournit des preuves issues de la neuroimagerie (IRMf) indiquant que même la parole dégradée parfaitement intelligible est traitée très différemment de la parole claire, ce qui indique qu'il ne suffit pas de considérer simplement l'intelligibilité. Elle présente ensuite un cadre de réflexion sur l'effort d'écoute qui pourrait permettre de faire progresser la recherche.
Voir la conférence (conférence en anglais).
EN SAVOIR PLUS
- Ingrid Johnsrude
- Programme 2020-2021 du colloquium du DEC
- Vidéos et podcasts des conférences
Séminaire DEC AltAc (Alternative to Academia)
Si les études en sciences cognitives conduisent souvent à une carrière académique, il existe aussi des débouchés importants hors de la recherche universitaire. Le séminaire DEC AltAc (Alternative to Academia) est un rendez-vous mensuel durant lequel des personnes ayant eu une formation en sciences cognitives montrent aux chercheurs et aux étudiants du département les nombreuses façons dont leurs connaissances en sciences cognitives peuvent être appliquées en dehors du monde académique. Les sessions sont filmées et visibles sur la chaîne youtube du DEC.
Les deux premières sessions de cette nouvelle saison portaient sur l'application des sciences cognitives au secteur de la santé avec Camille Lakhlifi et Benjamin Rohaut et l'amélioration du langage grâce aux sciences cognitives avec Lisa Jacquay et Marc Gurgand.
A noter : ce séminaire est en anglais.
Ancienne étudiante au Cogmaster, Camille Lakhlifi a forgé son experience à travers des stages, en s'impliquant dans des associations et en participant à des activités de vulgarisation scientifique. Après avoir obtenu de son diplôme, elle a rejoint un programme pré-doctoral et a travaillé un an pour l'Unité française d'étude du comportement. Elle entame maintenant un doctorat sur la prise de décision dans l'incertitude du contexte médical à l'Institut du Cerveau (ICM) sous la direction de Benjamin Rohaut et Mehdi Khamassi.
Benjamin Rohaut est neurologue. Il travaille dans l'unité de soins intensifs (USI) du service neurologique de l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière. Il est également titulaire d'un doctorat en neurosciences et effectue des recherches sur la conscience et la prise de décision à l'Institut du cerveau (ICM). Une partie de son programme de recherche vise à comprendre comment les préjugés cognitifs affectent la prise de décision des médecins.
Lisa Jacquay est associée temporaire d'enseignement et de recherche à l'Université Paris Nanterre et est la co-fondatrice du Lab Premiers Cris au CRI. Avec Marion Voillot, elle a créé Premiers Cris, une communauté de personnes intéressées par la petite enfance qui sont engagées dans un processus de recherche collaborative qui utilise la technologie numérique pour répondre aux questions concrètes de ceux qui s'occupent des tout-petits.
Marc Gurgand est professeur titulaire à l'Ecole d'Economie de Paris et chercheur au CNRS. Il participe à plusieurs projets qui favorisent le développement du langage dès le plus jeune âge, notamment le projet "1001 mots" et le projet "Parler Bambin" qui encourage et favorise le développement du langage dès le plus jeune âge.
EN SAVOIR PLUS
Programme DEC AltAc 2020-2021
A (RE)DECOUVRIR
Chaque mois, nous plongeons dans les archives audio et vidéo de l'ENS pour vous faire (re)découvrir les conférences passionnantes des chercheurs du DEC.
L' observation en linguistique, par Jérémy Kuhn
Jérémy Kuhn est chercheur à l'Institut Jean Nicod. Il s'intéresse à la sémantique du langage naturel, en particulier les données de la langue des signes. Dans une animation qu'il a réalisée lui-même, il explique ce qu'est l'observation en linguistique.
EN SAVOIR PLUS
- Site internet de Jérémy Kuhn
- Voir toutes les capsules vidéos du DEC pour la Fête de la Science 2020
Du bruit dans le cerveau, par Sophie Deneve
Sophie Deneve est chercheuse CNRS dans l'équipe "Group for Neural Theory" au Laboratoire de Neurosciences Cognitives et Computationnelles. Cette conférence a été donnée dans le cadre de la Semaine du Cerveau en 2014.
Une des propriétés les plus frappantes de l'activité cérébrale est son extrême variabilité. Pour un même stimulus, pour une même action motrice, ou même au repos le plus complet, les réponses enregistrées dans les neurones ne sont jamais deux fois les mêmes. Rien à voir donc avec les processeurs d'un ordinateur qui effectuent toujours les mêmes opérations programmées. Le cerveau est-t-il donc juste une machine imprécise, dont les processeurs sont défaillants ? Ou bien y a t-il des raisons plus profondes derrière cette variabilité ? C'est cette dernière hypothèse que Sophie Deneve présente dans cette conférence. En effet, elle montre que la variabilité de la réponse neurale va de paire avec un système optimisé pour sa robustesse face aux multiples perturbations naturelles auquel le cerveau doit faire face, et, en particulier, la mort neuronale. Au cours de notre vie nous perdons énormément de neurones, sans que cela ait d'impact significatif sur le comportement, la perception ou la cognition. Un ordinateur perdant ainsi ces processeurs cesserait très rapidement de fonctionner. La chercheuse montre que le cerveau est aussi précis et efficace qu'un ordinateurs, tout en étant bien plus robuste car partageant l'information entre de multiples "processeurs". La variabilité de l'activité cérébrale n'a donc rien à voir avec du "bruit".
Voir la vidéo.
QUELQUES PUBLICATIONS RECENTES
Roberto Casati, Achille Varzi (2020). A Slow Impossible Mirror Picture. Perception, doi:10.1177/0301006620967882
Abstract
A new type of impossible picture is presented and described. The picture involves an object along with its reflection in a plane mirror, delivering two apparently irreconcilable views of the object itself when seen simultaneously in its flesh and in the mirror. Contrary to other, more familiar impossible pictures, its interpretation requires explicit reasoning about the represented reality. It is a slow impossible picture.
Salvatore Florio, David Nicolas (2020). Plurals and Mereology. Journal of Philosophical Logic. doi:10.1007/s10992-020-09570-9
Abstract
In linguistics, the dominant approach to the semantics of plurals appeals to mereology. However, this approach has received strong criticisms from philosophical logicians who subscribe to an alternative framework based on plural logic. In the first part of the article, we offer a precise characterization of the mereological approach and the semantic background in which the debate can be meaningfully reconstructed. In the second part, we deal with the criticisms and assess their logical, linguistic, and philosophical significance. We identify four main objections and show how each can be addressed. Finally, we compare the strengths and shortcomings of the mereological approach and plural logic. Our conclusion is that the former remains a viable and well-motivated framework for the analysis of plurals.
Ava Guez, Hugo Peyre, Franck Ramus (2020). Sex differences in academic achievement are modulated by evaluation type. Learning and Individual Differences, 83–84, 101935. doi:10.1016/j.lindif.2020.101935
Abstract
Studies on sex differences in academic skills have often reported diverging results depending on the type of evaluation used, with girls typically obtaining better school grades and results at national examinations, and boys scoring higher at standardized tests. In this paper, we provide a framework for better understanding and interpreting these differences, integrating previously established factors that affect variations in the gender gap across evaluation types: writing skills, stakes, self-discipline and grading bias. We apply this framework to a dataset containing the results of 23,451 French students in three evaluations characterized by different combinations of these factors: teacher evaluations, national examinations, and standardized tests. We find that, overall, girls show lower performance than boys in mathematics and higher in French. However, this main effect is modulated by evaluation type: relative to boys, girls over-perform in teacher evaluations and under-perform in standardized achievement tests, compared to national examinations. These effects are larger in mathematics than in French. These results offer new insights regarding the extent to which writing skills, stakes, self-discipline and grading bias may influence the observed gap.
Mauricio de Jesus Dias Martins, Nicolas Baumard (2020). The rise of prosociality in fiction preceded democratic revolutions in Early Modern Europe. PNAS, 10.1073/pnas.2009571117
Abstract
The English and French Revolutions represent a turning point in history, marking the beginning of the modern rise of democracy. Recent advances in cultural evolution have put forward the idea that the early modern revolutions may be the product of a long-term psychological shift, from hierarchical and dominance-based interactions to democratic and trust-based relationships. In this study, we tested this hypothesis by analyzing theater plays during the early modern period in England and France. We found an increase in cooperation-related words over time relative to dominance-related words in both countries. Furthermore, we found that the accelerated rise of cooperation-related words preceded both the English Civil War (1642) and the French Revolution (1789). Finally, we found that rising per capita gross domestic product (GDPpc) generally led to an increase in cooperation-related words. These results highlight the likely role of long-term psychological and economic changes in explaining the rise of early modern democracies.
Jonathan F. Kominsky, Lewis Baker, Frank C. Keil & Brent Strickland (2020). Causality and continuity close the gaps in event representations. Mem Cogn, 10.3758/s13421-020-01102-9
Abstract
Imagine you see a video of someone pulling back their leg to kick a soccer ball, and then a soccer ball soaring toward a goal. You would likely infer that these scenes are two parts of the same event, and this inference would likely cause you to remember having seen the moment the person kicked the soccer ball, even if that information was never actually presented (Strickland & Keil, 2011, Cognition, 121[3], 409–415). What cues trigger people to "fill in" causal events from incomplete information? Is it due to the experience they have had with soccer balls being kicked toward goals? Is it the visual similarity of the object in both halves of the video? Or is it the mere spatiotemporal continuity of the event? In three experiments, we tested these different potential mechanisms underlying the "filling-in" effect. Experiment 1 showed that filling in occurs equally in familiar and unfamiliar contexts, indicating that familiarity with specific event schemas is unnecessary to trigger false memory. Experiment 2 showed that the visible continuation of a launched object’s trajectory is all that is required to trigger filling in, regardless of other occurrences in the second half of the scene. Finally, Experiment 3 found that, using naturalistic videos, this filling-in effect is more heavily affected if the object’s trajectory is discontinuous in space/time compared with if the object undergoes a noticeable transformation. Together, these findings indicate that the spontaneous formation of causal event representations is driven by object representation systems that prioritize spatiotemporal information over other object features.
François Recanati (2020). Langage, discours, pensée. Fayard, College de France, coll. "Leçons inaugurales", ISBN 978-2-213-71715-9.
Abstract
François Recanati offre un panorama de la philosophie analytique, et plus spécifiquement du sous-domaine qui en a longtemps constitué le cœur : la philosophie du langage, dans l’évolution de laquelle il discerne trois grandes phases. La première phase a donné naissance à la sémantique formelle, et la seconde à la pragmatique, deux disciplines qui ont profondément renouvelé la linguistique. La troisième phase, correspondant à la période actuelle, voit la philosophie du langage fusionner avec la philosophie de l’esprit au sein d’une théorie générale des représentations qui renoue avec le projet peircien d’une théorie générale des signes.
Frédérique de Vignemont (2020). Un homme augmenté mais à quel prix ? In Bénédicte Boyer-Bévière and Isabelle Moine-Dupuis (Eds). L’humain en transformation. Entre transhumanisme et humanité (pp 23-30)
Abstract
Pour que le transhumanisme devienne une hypothèse scientifique et non plus seulement une idéologie, il est nécessaire d’analyser le fonctionnement du cerveau humain. La recherche en neurosciences a révélé une certaine plasticité cérébrale, mais ces résultats n’impliquent pas l’absence totale de restriction sur les formes et le degré que les changements du cerveau peuvent prendre. Dans l’économie cérébrale, tout a un prix et l’augmentation de certaines capacités ne pourront se faire qu’au détriment d’autres. Cet article s’interroge sur la plausibilité du fantasme associé au transhumanisme à la lumière des limites fondamentales de l’esprit humain.
AGENDA
Retrouvez les événements en ligne organisés par le DEC sur l'agenda du département.
Retrouvez certaines de nos conférences en accès libre sur notre chaîne youtube du DEC nouvellement créée, sur le site des Savoirs de l'ENS (Colloquium du DEC, la Semaine du Cerveau) et sur la chaîne youtube de l'école (conférences grand public, Semaine du Cerveau, Nuits de l'ENS etc.)
Ailleurs à PSL
Sophie Cohen-Bodénès et Guilhem Marion, doctorants aux Laboratoire des Systèmes Perceptifs, en collaboration avec Rémi Mermet post-doctorant au Laboratoire Pays Germaniques de l'ENS organisent dans le cadre de la Chaire BEAUTÉ (S) PSL-L'OREAL le séminaire Jeunes Chercheurs dont l'objectif est d'offrir une réflexion collective et interdisciplinaire sur la question de la beauté, et toutes les thématiques afférentes. La première session aura lieu en ligne le 10 décembre de 16h à 18h avec Fleur Hopkins (Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne) "Monstres et merveilles dans l'imaginaire merveilleux-scientifiques : hybrides, chimères et hommes-bricolés". Découvrez le programme.